Après Marcin Mielczewski et Mikolaj Zielenski, voici Kaspar Förster pour cette nouvelle incursion des Traversées Baroques dans le si riche univers musical de la Pologne du XVIIème siècle. Si le peu d’éléments biographiques dont on dispose à son sujet permettent difficilement de se faire une image précise de ce personnage, en revanche chaque information relative à sa carrière vient confirmer, si ses oeuvres n’y suffisaient pas, que nous sommes en présence d’un compositeur majeur et ayant occupé une place prépondérante en Europe du Nord. Il naquit en 1613 à Oliwa non loin de Dantzig. C’est auprès de son père – également prénommé Kaspar – qu’il reçut les premiers rudiments de son éducation musicale. Une banalité pour l’époque si l’on ne savait que ce Kaspar « l’ancien », lui même bibliothécaire de l’Akademische Gymnasium et chantre à la Marienkirche de Dantzig déclencherait dés 1625 une violente polémique à laquelle se mêleraient plus tard deux personnages appelés à jouer un grand rôle dans la vie de Kaspar junior: Marco Scacchi et Heinrich Schütz. Nous y reviendrons…
C’est précisément auprès de Scacchi que notre Förster poursuivra ses études musicales jusqu’à une date que l’on peut situer autour des années 1632-1633. Un bien intéressant personnage: théoricien et compositeur, Scacchi qui vécut de 1602 à 1662 avait été l’élève de Giovanni Francesco Anerio avant de connaître une brillante carrière en Pologne où il fut successivement musicien royal au service de Sigismond III, puis maître de chapelle à Varsovie, fonction qu’il exerça encore sous les règnes de Ladislav IV Vasa et de Jean II Casimir Vasa jusqu’en 1649, année de son retour définitif dans son Italie natale. On peut penser que c’est sur son conseil que Kaspar Förster se rendit à Rome entre 1632 et 1636 pour y travailler au Collegium Germanicum auprès de Giacomo Carissimi. S’ensuivra une longue période pendant laquelle, de retour à Dantzig, il est mentionné comme chanteur et chef de choeur à la Marienkirche dont son père était le maître de chapelle depuis 1625. De 1652 à 1655 ses pas le mènent au Danemark où il sera assez brièvement musicien attaché à la cour de Frédéric II avant de revenir à Dantzig remplacer à la Marienkirche son père qui venait de disparaitre. Il n’y restera cependant guère et les années qui lui restent à vivre avant de revenir à Oliwa où il s’éteindra en 1673 témoignent d’une véritable frénésie de voyages, de rencontres ainsi que des aventures qui lui sont prêtées. Ne dit-on pas ainsi que son séjour à Venise lui valut de servir comme capitaine des armées dans la cinquième guerre contre les Turcs (ce qui lui aurait valu la distinction de chevalier de l’ordre de Saint Marc). Quoiqu’il en ait été, c’est avec plus de certitude qu’on le retrouvera une fois encore à Copenhague pour y renouer avec ses anciennes fonctions, avec l’intermède d’un voyage à Dresde où il rencontra Heinrich Schütz.
Seule une telle trajectoire nous permet de comprendre le langage musical de Kaspar Förster, remarquable synthèse entre les tendances musicales propres à l’Europe du Nord et celles propres au Sud. C’est sans aucun doute ce qui marque la grande différence entre ce compositeur et Mielczewski et Zielenski (Cf les précédents enregistrements des Traversées Baroques) tous deux plus étroitement inféodés au langage musical vénitien d’Andrea et Giovanni Gabrieli.
Création du programme consacré à Kaspar Förster le 13 juin 2015 dans le cadre du Festival du Haut-Jura.
Reprise au 28è Festival international de Sarrebourg le jeudi 9 juillet 2015 à 20h.
Sortie du disque à l’automne 2015 pour le label K617.